(Interview exclusive) Tout savoir sur Tidiane Soumah, PDG de Tidiane World Music(TWM)
La rédaction de guineepeople.com est allée à la rencontre de Tidiane Soumah le PDG de Tidiane world Music (TWM) le plus grand diffuseur de spectacles dans l’histoire de la Guinée et l’un des meilleurs sur le continent Africain
Avec plus de 30 ans d’expérience dans le domaine du Show-biz, Tidiane Soumah est considéré par beaucoup de guinéens comme une véritable chance pour la Guinée, un modèle d’entrepreneur qui mérite d’être connu par la jeune génération.
Avec lui, nous avons eu à échanger sur son parcours depuis ses débuts à Conakry, passant par le Canada jusqu’à son retour au pays. Nous avons également abordé les questions liées aux différentes querelles qui gangrènent le monde du show-biz et beaucoup d’autres sujets. Lisez!
Guinée People : Bonsoir Monsieur Tidiane Soumah! Beaucoup de gens connaissent ta structure ”Tidiane World Music” mais peu vous connaissent en personne. Alors qui êtes-vous ?
‘’Bonjour guineepeople. Il est vrai que peu de personnes me connaissent en tant que Tidiane Soumah. Je suis né dans le temple du savoir, c’est-à-dire dans la cours de l’université Gamal Abdel Nasser de Conakry. Mon père était le médecin de cette université durant 35 ans et notre mère était directrice d’école à Dixinn.
J’ai grandi et étudié dans cette université où je suis sorti après mes 5 années de formations parmi les majors en sociologie. Dans les années (1986-1992) notre génération a eu la chance de bénéficier d’une formation académique privilégiée aux temps de Lansana Conté à travers la coopération appelée «Top 10 » qui permettait aux étudiants guinéens d’avoir les mêmes professeurs que les étudiants français. Il s’agissait des professeurs français d’origine guinéenne, payés au même prix qu’en France.
Apres nos études, on a travaillé pendant plus de 5 ans pour les Nations Unis à travers l’UNICEF. On a eu à installer presque toutes les antennes de l’UNICEF à travers le pays, plus de 33 comités pour l’enfance. J’ai été le coordinateur de toutes les activités des ONG et des comités pour l’enfance à travers toute la Guinée de 1990-1995.’’
Guinée People : Nous nous rendons compte que vous avez eu un cycle universitaire brillant et un début de carrière exceptionnel. Malgré cette formation, vous avez choisi d’être dans la musique. Vous pouvez nous dire d’où vient cette passion pour le monde des spectacles ?
‘’Le choix n’a pas été facile même pour ma famille. Mais, c’est une passion qui est née en moi par altruisme à l’université. Les étudiants qui venaient de l’intérieur du pays étaient isolés, s’ennuyaient dans le campus, ils n’avaient pas où aller. Vous savez avec le changement de régime, la Guinée a connu un vide culturel. A l’époque il n’existait que deux agences ‘’Africa Show Agency’’ qui a été la première agence privée de l’histoire du show-biz guinéen, fondée par Sékou le gros, Alpha Traoré Gims et Diabaté, l’actuel administrateur du palais du peuple.
La seconde était ‘’Guinée Business Marketing’’ (GBM) d’Antonio Souaré. Antonio, un homme discret et humble à travers qui, nous avons créé ‘’Universitaire pour la Promotion du Spectacle’’ (UNIPROS) qui a été ma première structure co-fondée par Abdoulaye Chéri Camara, Mamady Diomandé et Lounsény Camara (Bosik). Par la suite est né ‘’CHETIBA’’ avec Chéri, Moi, Bao Kaba et Bouba Gueye. Cette structure a été l’une des plus grande agence du pays. Voilà ce qui explique un peu mon début dans le monde show-biz.’’
Guinée People : Comment est venue l’idée de création de la structure ”Tidiane World Music” (TWM)?
‘’Le 30 juin 1992, j’ai décidé d’évoluer seul parce qu’une carrière en solo me tentait beaucoup. Apres avoir accumulé plusieurs expériences au cours de nos différentes collaborations, j’ai jugé nécessaire de poursuivre mon propre chemin. Mais avant, j’ai donné un coup de main à ‘’Gris-Gris Production’’ de Mme Rougui Baldé avec la sortie de l’album « Allah Nana » d’Ibro Diabaté le 18 septembre 1993. Nous avions organisé la dédicace du début à la fin.
La structure Tidiane World Music a lancé ses activités officiellement les 2 et 3 Octobre 1993 sur les bords de l’hôtel de l’Unité, actuel hôtel Riviera et dans la salle du cinéma liberté. L’idée m’est venue dans les bureaux de l’UNICEF avec l’assistance de Justin Morel Junior, Mme feue Edouard Benjamin et d’Almamy Barry qui sont mes mentors. En 7 années d’existence de la structure, je suis parti à l’extérieur pour 10 ans, maintenant je suis en guinée il y a 7 ans.’’
Guinée People : Tidiane World Music a contribué à la naissance de plusieurs stars en guinée. Dites-nous comment avez-vous réussi cela ?
‘’Sous le régime de Sékou Touré, la musique appartenait à l’Etat. Il n’y avait essentiellement que des orchestres. C’est seulement après sa disparition qu’on a vu la création des premiers groupes privés et assisté les artistes évolués en solo, tels que : Sékouba Bambino, Doura Barry, Ibro Diabaté, Sékouba Kandia, qui font partis des premiers artistes privés. J’ai eu le privilège d’être parmi ceux-ci qui ont créé la nouvelle musique guinéenne, en permettant aux artistes de se produire et de se faire connaitre. Par exemple, quand Bambino a sorti son premier album avec Djouldé Sall (Super Sélection), nous avions servi d’espace pour sa diffusion, à sa consécration comme star en 1992. En quelque sorte, nous avions joué le rôle de l’Etat qui faisait ce travail à travers l’Agence Guinéenne de Spectacle née en 1973.
De 1993 à 2000, j’ai été l’un des premiers promoteurs à permettre aux artistes guinéens de faire des tournées à travers le pays. On a contribué au mieux à la révolutionne de la nouvelle musique guinéenne. Quand j’ai compris que les choses tournaient autrement, je suis allé au Canada en 2000.’’
Guinée People : Au Canada, on sait que vous y avez passé un beau temps qui t’a permis finalement d’en avoir la nationalité. Alors dis-nous comment tu as réussi à faire parler de vous là-bas?
‘’J’ai vécu plus de 10 ans au Canada avec ma famille. Quand je suis rentré au pays, j’ai eu à rencontrer quelques difficultés naturellement. J’ai dû suivre une formation en leadership organisationnel et en management au HEC. Après quoi, j’ai eu la chance d’avoir la fonction de directeur de la programmation du plus grand festival africain d’Amérique du nord appelé ‘’les nuits d’Afrique’’. A travers ce poste stratégique, j’ai pu faire voyager et produire entre 2001-2011, plus de 45 artistes guinéens à travers le monde sur les plus grandes scènes mondiales et dans plus de 40 villes. Durant 5 ans, de 2005 en 2010, Bambino a été notre artiste principal avec qui, j’ai fait presque le tour du monde et jouer au stade de France en 2011. C’est cette expérience avec lui, que j’ai voulu partager avec les autres artistes et promoteurs du pays.’’
Guinée People : Avec tout ce que vous venez de citer, Dites-nous, quel bilan faites-vous de votre parcours ?
‘’A mon retour en guinée en 2009, j’ai essayé de mettre en place les bases d’une agence modèle avec les spectacles de haut niveau. Pour cela, j’ai fait venir des grands noms de la world musique en Guinée. Mais ce bilan, c’est le public qui peut le faire car c’est lui que nous servons tous les jours. Mais mon rêve est encore plus grand.’’
Guinée People : Qu’est-ce que vous pensez de l’industrie du Show-biz en Guinée ?
‘’L’industrie du Show-biz en Guinée fonctionne mal. Quand on voit le meilleur public d’Afrique souffrir par manque de lieu de spectacle, on a du mal à comprendre. Comment on peut fermer le cinéma liberté depuis 2009, une salle pouvant accueillir plus de 1000 personnes pendant qu’on a un réel souci de diffusion de spectacle dans le pays. Aucun investissement dans ce domaine.
La Guinée est un grand pays qui adore la musique, le spectacle vivant. Mais fort malheureusement les jeunes guinéens manquent de formations à tous les niveaux dans l’industrie musicale. L’école théorique de l’Institut Supérieur des Arts de Guinée (ISAG) de Dubréka est inefficace par manque de moyens malgré la bonne volonté de ses dirigeants. La Guinée manque d’ingénieurs de son et lumière, de techniciens de son et lumière, de programmeurs, de régisseurs. Nous sommes obligés de faire appel à l’expertise étrangère. C’est honteux pour un grand pays comme le nôtre. La formation est une obligation de l’Etat, car elle coûte chère pour nous opérateurs privés.’’
Guinée People: Au vu de ces réalités, qu’est ce que vous avez envisagé comme projet pour aider la jeunesse ?
‘’Cela a toujours été notre objectif. Notre combat aujourd’hui est la formation des jeunes dans le domaine du show-biz. C’est d’ailleurs l’objectif principal de mon voyage au Canada pour aller convaincre la plus grande école du Show-biz à ouvrir une école en Guinée. Une manufacture pour équiper le pays en équipements de haut niveau et d’un studio de dernière génération. Le Canada est l’un des meilleurs pays au monde dans le domaine du show-biz et il peut nous assister.’’
Guinée People: Votre dernier mot ?
‘’Je remercie Momo Camus et toute l’équipe de guineepeople.com d’avoir fait le déplacement jusqu’à Bruxelles pour réaliser cette interview. Les journalistes culturels en Guinée devraient faire autant, venir se renseigner à la source pour avoir de la bonne information au lieu d’être toujours à la recherche du buzz. La jeune génération a besoin d’être bien informée. En Guinée, quand je vois que certains journalistes touchent à des sujets qu’ils ne maîtrisent pas, cela me révolte. Ils ne prennent pas le temps de fouiller en profondeur avant de diffuser des informations. A ceux qui nous critiquent, merci pour tout, car cela nous aide à faire mieux. Encore une fois, on lance un appel dans le secteur du show-biz, en disant que la division n’est pas bien. On perd trop de temps trop et d’énergie pour rien.”
Entretien réalisé par Momo Camus